En regardant le JT de France 2 de 20H vendredi 15 janvier 2016, j'ai été frappé par l'interview de Rob Lawrie, ancien soldat britannique jugé jeudi 24 janvier 2016 pour avoir tenté de faire entrer clandestinement en Angleterre Bahar Ahmadi, une fillette Afghane (à partir de 20mn39sec).
Rob Lawrie, qui menait une action humanitaire dans la jungle de Calais, avait plusieurs fois dû refuser au père qui lui demandait d'emmener sa fille dont il s'était pris d'affection. Elle devait être accueillie en Angleterre par de la famille de la fillette déjà installée en Angleterre.
Et c'est impulsivement, sans prévenir sa femme, qu'il a franchis le pas de ce geste à la fois altruiste et illégal selon les lois françaises et anglaises. C'est sa propre enfance dans un foyer d'accueil où il aurait bien aimé être secouru qui est remonté à la surface et a contribué à son geste impulsif.
Rob Lawrie, interviewé, exprime ses regrets d'un geste qu'il paye fort cher et qu'il aurait pu payer encore plus cher puisqu'il était menacé de passer par la case Prison. Tout en exprimant sa gratitude à la justice française pour le verdict clément de 1 000€ avec sursis.
Des regrets, non seulement parce qu'il considère avoir fait quelque chose de "mal et illégal", mais parce qu'il considère avoir ruiné sa vie et il appelle celles et ceux qui l'écoutent à ne pas suivre son exemple.
"Vous ne pouvez pas aider tout le monde, mais tout le monde peut aider quelqu'un".
Telle est la phrase qui m'interpelle particulièrement en l'écoutant. Vous savez, une forme d’uppercut qui sonne comme une évidence et une direction. Je me suis fait immédiatement la réflexion qu'il me fallait noter cette phrase et en faire quelque chose.
Ce matin, par curiosité, j'ai utilisé un moteur de recherche sur Internet pour voir s'il pouvait s'agir d'une citation, proverbe ou autre. Et effet, oui, il s'agit d'une citation attribuée à Ronald Reagan.
Certaines personnes aiment bien relayer des proverbes, citations, métaphores, verbalement ou par écrit, quelques fois illustrées par une belle photo. On en voit souvent circuler sur les réseaux sociaux. Elles peuvent faire du bien et nous rappeler à des évidences et influencer nos attitudes et nos comportements. Quelques fois, certaines peuvent nous interpellent particulièrement, voire font effet de révélation.
Rob Lawrie, lui a fait plus que citer, il est l'incarnation de ce proverbe. Et c'est à la fois avec tristesse et admiration que je l'ai vu exprimer des regrets alors même qu'un tribunal par sa clémence lui avait envoyé un message explicite de reconnaissance (oui c'était illégal, mais oui c'était aussi un geste humanitaire).
Rob Lawrie a payé cher cette période à Calais et son geste illégal : 30 000€ (une bonne partie de ses économies), il a perdu sa famille, sa femme qui l'a quitté (il ne lui en veut pas car il ne lui avait pas demandé son avis). Il se trouve a posteriori stupide mais sans pour autant renier son combat humanitaire. Il refuse ostensiblement le statut de héros ce qui me le rend d'autant plus sympathique.
Si le tribunal a eu un verdict clément, peut-être peut-on l'attribuer en partie au soutien dont Rob Lawrie a été lui-même bénéficiaire à travers des pétitions (dont une sur change.org ayant rallié 125 000 signatures) qui ont circulé de chaque côté de la Manche.
Puissent les soutiens perdurer permettant à Rob Lawrie de sortir de son sentiment actuel selon lequel il a ruiné sa vie.
En remarquant que d'autres lieux, d'autres lois, d'autres temps, d'autres mises en perspective en feraient/font un tableau où les regrets ne devraient pas avoir leur place.