Jeudi 29 juillet 2021, nous humains avons déjà consommé les ressources de la planète que nous ne devrions pas dépasser pour une année entière. Il s'agit du dépassement des capacités de régénération de notre planète sur une année. C'est ce qu'on appelle communément le "Jour du dépassement".
L'année dernière, avec les deux premières vagues du Covid et les impacts sur les activités économiques, le jour du dépassement était un peu plus tard dans l'année (22 août, niveau de 2012) ce dont on s'était réjoui. Malheureusement, d'une part les activités économiques extractrices ont repris de plus belle et d'autre part les puits de CO2 (notamment la forêt amazonienne) sont victimes de destruction. Résultat : cette année, le jour du dépassement revient au niveau de 2019. On imagine ce qu'aurait pu être ce jour du dépassement en 2021 sans la crise du Covid-19 ; à savoir, survenir encore plus tôt dans l'année.
La métaphore du garde manger
Voici une métaphore de ma composition pour aborder ce sujet du jour du dépassement : imaginez que l'on vous donne votre réserve alimentaire pour une année en début d'année et à vous de la gérer pour tenir jusqu'au 31 décembre. Vous avez dans vos réserves 365 parts.
Une personne responsable utilisera grosso modo une part par jour, et les jours où elle dépassera sa part quotidienne seront compensés par des jours où elle s'alimentera moins.
Une personne peu prévoyante consommerait peut-être plus pendant les premiers mois, mais finirait par s'apercevoir au bout d'un moment que les réserves risquent de manquer. Elle s'astreindrait alors à réduire sa consommation pour les jours restants.
Seulement, à l'image de ce que fait un humain en moyenne sur terre, il utilise 1,75 parts par jour au lieu d'une part, se désintéressant totalement de l'état du stock. Et le 29 juillet, elle se trouve avec sa réserve vide. Et la différence qu'il y a entre ce garde manger vide et les ressources de la planète, c'est qu'en fait, l'humain va tranquillement s'autoriser à puiser dans les ressources qui ne lui sont pas allouées, faisant fi des lois de la nature, et en particulier des lois de la régénération et des cycles de la nature. Ce qui constitue à la fois un manque de connaissance, d'éducation, de responsabilité, de clairvoyance, de gestion, de bienveillance, d'appréciation, de gratitude,...
Et nous françaises et français faisons encore pire que la moyenne des humains sur terre : nous consommons 2,9 parts au lieu d'une chaque jour. Et en réalité notre jour du dépassement en France est le 6 mai (le jour du dépassement tel qu'il serait si tous les humains consommaient les ressources de la planète à l'image de la population française).
La métaphore du mur
Depuis maintenant de nombreuses années à l'échelle d'une génération, le GIEC (dont le prochain rapport s'annonce encore plus inquiétant) compile des données à travers le monde entier pour tirer un constat qui, au fil des années, non seulement montre que la situation s'empire, mais que les échéances se profilent plus tôt que prévues précédemment.
Voici une métaphore de ma composition pour figurer une partie des enjeux autour des émissions des GES (Gaz à Effet de Serre) :
- nous roulons à grande vitesse en direction d'un mur
- nous savons que nous nous approchons du mur mais nous nous disons que nous avons largement temps de freiner, malgré l'avis de la plupart des scientifiques compétents sur les sujets concernés ; de nombreux d'entre eux sont affolés, affligés voire désespérés
- non seulement nous ne freinons pas, mais en plus nous continuons à appuyer sur l'accélérateur, à la fois trop sûr de nous-mêmes et de notre voiture, et trop inconséquent face au danger
- et ce que j'appellerai trivialement le pompon : le mur lui-même s'avance vers nous en même temps qu'on s'avance vers lui à une vitesse non constante et avec de fortes accélérations (points de basculement).
Un sentiment de certitude commence à dépasser largement le cercle des collapsologues (cf collapsologie) : nous allons nous prendre le mur.
Je résume la situation : nous faisons la razzia sur notre garde manger chaque jour, et depuis des années. Par ailleurs, nous allons à grande vitesse droit dans un mur qui lui-même se rapproche de nous. Mais heureusement, d'autres planètes nous attendent que nous nous hâtons d'aller explorer alors même qu'il nous suffirait de prendre soin de celle où nous vivons.
Nous avons besoin indéniablement de nous appuyer sur deux principes qui étaient gravé sur le fronton du Temple de Delphes : "Connais-toi toi-même !" et "Rien de trop !".
Selon moi, l'idée de Société et de Territoires de la Bienveillance peut contribuer à faire face de manière responsable et bienveillante à ces enjeux.
Du dépassement des lois de la nature au dépassement des intérêts égoïstes et court termistes
Pour faire face à ce dépassement que nous humains nous nous octroyons maintenant largement en toutes connaissances de cause, il nous faut selon moi aborder une autre forme de dépassement : le dépassement des intérêts individuels et collectifs égoïstes et court terme. Il nous faut aussi sortir du déni et de la passivité.
Il nous faut aborder la bienveillance en plusieurs directions :
- la bienveillance envers la terre précieuse qui nous abrite, nous nourrit,
- la bienveillance envers nous-mêmes car nous jouons notre propre vie et notre propre avenir
- la bienveillance envers les humains loin de chez nous qui sont les premiers confrontés aux conséquences du dérèglement climatique (causé par nous humains et non par la fatalité)
- la bienveillance envers les générations futures pour qu'ils ne paient pas la note salée voire mortelle de nos comportements
- la bienveillance envers le vivant dans son sens le plus large
Une bienveillance qui porte attention et soin à tout ce qui nous est (ou devrait être) précieux, en pleine conscience et en pleine responsabilité. Je vous renvoie à ma vision de la bienveillance.
Il nous faut connaître le fonctionnement de notre cerveau et notamment la force considérable du striatum, et les façons artificielles dont nous comblons notre besoin de sens.
Il nous faut arrêter de considérer que c'est toujours à d'autres de faire leur part en premier.
Il nous faut articuler la responsabilité individuelle et les responsabilités collectives.
Il nous faut regarder sans complaisance nos comportements à l'aune d'un extra-terrestre qui viendrait découvrir nos modes de vie à la Pac-Man alors que de nombreux feux clignotent au rouge.
Il nous faut savoir considérer les sacrifices qui sont absolument nécessaires selon moi, à la sauce bienveillance (cf ma chronique Des sacrifices bienveillants qui nous libèrent). Des sacrifices pour nous faire revenir à consommer notre stricte part et pas plus, et pour commencer à freiner afin d'amortir tant soit peu le choc avec le mur.
Il s'agit pour nous humains de faire exactement le contraire de ce que nous avons fait depuis quelques générations : nous dépasser et dépasser l'appétit gargantuesque de notre striatum et de notre société de consommation, pour être des acteurs de bienveillance plutôt que des acteurs de destruction. Aussi bien envers la planète et le vivant, qu'envers nous-mêmes, nos proches, les autres humains à tous les coins de la planète, et les générations futures.
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